Texte de Christiane Laforge
lu à la présentation de Christian Roberge
au gala de l’Ordre du Bleuet le 2 juin 2018
Né le 16 mai 1959 à Ticouapé (Saint-Méthode fusionné à Saint-Félicien en 1996) dans une maison familiale intergénérationnelle comptant 7 garçons et une fille, Christian Roberge est marqué par le sceau parental : la théâtralité de son père, Rock Roberge, conteur, commis et dynamiteur d’un côté, la transmission des mots et des sons de sa mère Simone Darveau, maître de poste, organiste, passionnée de généalogie, de l’autre côté.
Les sports, les mathématiques et les sciences n’ont pas d’attrait pour le jeune étudiant qui a joué son enfance sur une grande scène imaginaire, alimentée par Fanfreluche et les personnages de la Ribouldingue.
« Enfant, j’ai toujours aimé dessiner, bricoler, faire de la musique (piano, violon) et monter des pièces de théâtre avec mes jeunes frères. Il nous arrivait même d’emprunter la caméra de notre frère ainé pour faire des petits films. J’étais directeur artistique, metteur en scène, scénariste et costumier... »
Quand sonne la cloche des études collégiales, il doit choisir ce qu’il veut devenir. Être archéologue pour l’histoire et la recherche ou géographe. La discipline se doit d’être intéressante et payante. Ce qui exclut les arts plastiques, croit ce fils d’une mère commis comptable. Il lorgne avec intérêt du côté de l’aménagement intérieur, bien que dans son milieu cela soit considéré comme un métier essentiellement féminin. Il affronte déjà bien des préjugés pour sa « différence », mais avec l’appui inconditionnel de sa famille, il ose et obtient un diplôme d’études collégiales en Aménagement intérieur au Cégep de Trois-Rivières, complété, en 1998, par un Baccalauréat en Communication graphique et arts visuels à l’Université Laval.
Tour à tour Designer, étalagiste et graphiste à Trois-Rivières, Laval et Québec, il revient travailler à Dolbeau en 1985. Plusieurs entreprises feront appel à ses talents, dont Le Groupe Proconcept et les Architectes Associés où il fait carrière depuis 1997. Ce retour en région va combler les rêves de sa jeunesse.
« C’est à ma dernière année d’université que je découvre, par hasard, le métier de scénographe. Une amie, Véronique Théberge, m’avait invité à rallier les rangs, comme choriste, du Chœur Les Rhapsodes de Québec, où on y montait l’opéra Orphée et Eurydice de Gluck. C’était la première fois que je montais sur une scène où je pouvais voir toutes les étapes de la création d’un spectacle (mise en scène, costumes, décors, maquillage, etc.). Un monde fascinant dont j’ignorais complètement l’existence... J’étais impressionné de voir évoluer le travail du scénographe Augustin Rioux et de sa collègue. Sans trop le réaliser, je les enviais… Ayant déjà deux formations qui me rendaient heureux, je n’ai jamais pensé que je pourrais un jour toucher à ce domaine. Cette expérience ne restait pour moi qu’un beau souvenir. »
C’était mal connaître certains Robervalois. Invité par Pauline Séguin, en quête de voix d’homme pour le chœur de la comédie musicale Dis-moi c’est quoi ton rôle, mise en scène par Réjean Gauthier du théâtre Mic-Mac de Roberval, Christian est aussitôt harponné par ces passionnés de théâtre.
« Après quelques échanges, Réjean me demande de collaborer avec lui, à la création des décors et des costumes. Nous avons tout de suite eu un coup de foudre "artistique" et nous avons développé une complicité qui ne nous a jamais quittés! C’est à partir de ce moment qu’a commencé mon apprentissage dans le monde du théâtre. Après une courte période de fréquentation et une offre d’emploi à Montréal que je refuse (et oui), je déménage à Roberval avec un nouvel emploi comme graphiste et y intègre les rangs du Théâtre Mic-Mac, où j’y ai développé le goût pour la scénographie. Faut croire que les étoiles étaient alignées... Réjean a toujours été un moteur pour moi, c’est un créateur prolifique qui m’impressionne beaucoup! »
La formation et la polyvalence de Christian se révèlent fort utiles pour le Théâtre Mic-Mac. En 30 ans, il a réalisé 22 décors, 30 affiches de théâtre et les costumes de sept productions. Il siège depuis 10 ans au conseil d’administration de cette compagnie de théâtre dont 6 comme président. Il a fait la mise en scène de deux spectacles de danse pour la troupe Les Tourbillons du Lac et réalisé trois scénographies pour la Société d’art lyrique du Royaume.
Grand voyageur, féru de musées, de spectacles et de cinéma, Christian Roberge ne regrette pas son retour au Lac-Saint-Jean. Bien qu’amoureux de l’effervescence des métropoles, il ne doute pas avoir trouvé ici, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, sa place et le sens de sa nature d’artiste. Non seulement il y voit sans cesse de nouveaux défis, mais aussi une carrière intéressante.
« Roberval… Je suis en mesure de constater que cette région m’attendait. J’avais une mission à accomplir et je suis fier aujourd’hui de mon parcours. Fier d’avoir participé, à ma manière, à faire de cette région, une des plus belles et des plus dynamiques du Québec! »
Et si le théâtre lui tient à cœur, il s’engage également au développement d’autres activités culturelles et sociales : conception et réalisation d’évènements au village de Val-Jalbert, animation à la Bibliothèque Georges-Henri-Lévesque de Roberval, design intérieur à l’Hôtel-Dieu de sa ville, participation à Zoom sur Roberval-Mashteuiatsh et Zoom sur Saint-Élie-de-Caxton, Fête du 40e de la Traversée internationale du lac Saint-Jean, championnat d’haltérophilie de Dolbeau. Il collabore avec différents comités pour la revitalisation du centre-ville de Roberval, les Vitrines-Musée, le 50e du Mic-Mac, le 150e de Roberval, la sauvegarde du Vieux Couvent de Saint-Prime. Il fait la conception graphique de plusieurs livres commémoratifs dont un livre de conte de son père Rock Roberge, Toujours est-il, contes et histoires de mon père.
En 2009, Christian Roberge emporte le prix de la meilleure scénographie pour Le rire de la mer au Gala des Arlequins. En nominations plusieurs fois pour son travail, il gagne le prix très convoité de la meilleure scénographie au Festival international de théâtre de Mont-Laurier en 2017.
Ardent défenseur de la langue française, travailleur acharné, Christian suscite l’admiration pour sa contribution bénévole à de nombreuses activités culturelles. Marc-André Lévesque, président et chef d’exploitation de RNC Média, écrit :
« Christian, c'est cette force tranquille et ce travailleur infatigable qui peut créer de grandes choses avec peu de moyens. C'est l'artiste qui peut transformer des articles inutiles ou démodés en œuvres d'art. Christian, c'est l'homme aux mille idées qui peut faire de grandes choses avec peu. C'est aussi le rassembleur qui sait mobiliser autour de lui nombre de bénévoles et de gens passionnés dans un élan de solidarité et de créativité. Son action et son implication dans le milieu ont contribué à démocratiser et rendre plus accessible les arts de la scène et les arts visuels. Sa présence et son action ont laissé une empreinte indélébile dans les milieux culturels robervalois et jeannois. »
Christian Roberge
Artiste designer et scénographe
pour sa contribution exceptionnelle à la vitalité culturelle de sa région
fut reçu
Membre de l’Ordre du Bleuet